IL N'EST NUL BESOIN D'ESPERER POUR ENTREPRENDRE
"Rien n'est vrai, tout est permis". Ce slogan qui a fait tant de mal au XXe siècle, conforte notre conviction que les idées les plus fortes ne sont pas nécessairement les meilleures ni les plus vraies mais celles qui ont le plus d'aptitudes à imposer leur monde. Les idées qui font peur font partie aujourd'hui aussi de celles-là. Elles forment ce qu'on pourrait appeler un camp de concentration cognitif, ce camp dont la profondeur, la diversité et l'étendue sont encore loin d'avoir été entièrement explorées.
Ce genre de camp de concentration est généré par toute technologie politique qui favorise, induit, fabrique, développe le type anthropologique dont l'existence est indispensable à son fonctionnement et à sa reproduction. La puissance des institutions dans les sociétés technoscientifiques réside dans leur capacité à créer et nommer la réalité sociale que forgent leurs experts afin de la gérer, puis d'imposer à tous cet écheveau d'entités fictives – ces armes de distraction massive - en faisant oublier qu'elles ont été produites. À ces techniques de capture cognitive s'ajoute aujourd'hui une panoplie de connaissances et de moyens permettant d'intensifier les comportements-réflexes favorables au "bon" fonctionnement des sociétés administrées, de projeter une société psychocivilisée et de rêver d'une population téléguidée.
Les humains ayant atteints les limites de leur biotope, la colonisation "extérieure" étant close pour le moment, la planète s'étant rétrécie comme une peau de chagrin, la colonisation de la vie intérieure connaît aujourd'hui une nouvelle phase d'expansion.
Le contrôle biochimique de la population au travers de la diffusion massive de drogues légales ou illégales, la création d'hallucinations consensuelles par le savant management de l'information et de sa réception cognitive, et le conditionnement psychotronique quotidien par l'accroissement incessant du bain électromagnétique, font des citadins des individus possédés, assujettis à un psychopouvoir et ses psychotechnologies.
Quelle est, dans ces nouveaux environnements concentrationnaires, la place pour une liberté du penser ? S'agit-il d'un résidu fossile des sociétés bourgeoises ? D'un genre particulier de camp de concentration cognitif ? Mais peut-on parler sans la supposer , au moins théoriquement ? La liberté de penser requiert dans sa version la plus radicale, une théorie de la connaissance qui lui soit propre. Car si la théorie de la connaissance peut imposer un monde, un camp de concentration cognitif, elle peut aussi en cisailler les clôtures au risque de susciter un chaos qui, supprimant la possibilité même d'avoir un monde, produirait la camisole cognitive la plus efficiente que nous connaissions.
C'est pourquoi toute théorie de la connaissance suppose aussi une capacité de s'orienter en eaux troubles. Cette capacité ne renvoie pas à proprement parler à une métacartographie, car elle ne retourne pas d'une cognition. C'est davantage une aptitude éthique et, pourrait-on dire, spirituelle, recourant à l'imagination, à l'inspiration et à l'intuition pour dégager des devenirs possibles traversant les murs d'un monde qui s'est refermé sur lui-même comme un tombeau.
SOMMAIRE
Page 2 et 3 - Matrices de subjectivation. Anthropogenèse, technogenèse, exogenèse par le Bureau d'études
Pages 4 à 7 - Future map ou Comment les cyborgs ont appris à ne plus s'en faire et à aimer la surveillance par Brian Holmes
INSERT Page 8 - Dictionnaire de réalité tactique (extraits) (1) par Konrad Becker
Page 9 à 12 - Molécules de combat. Vers la guerre psychique asymétrique par Ewen Chardronnet
INSERT Page 12 - Dictionnaire de réalité tactique (extraits) (2) par Konrad Becker
INSERT Page 17 à 18 - S'injecter des drogues : genèse d'un outil par Nicolas Bonnet, Yves Edel et Lionel Sayag
Page 13 à 19 - Destin du psychonaute occidental par Michel Tibon-Cornillot (EHESS)
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Le site : http://www.laboratoryplanet.org
Le N°3 est prévu pour le 23 septembre et questionnera l'émergence d'une nouvelle géopolitique polaire, le spectre de l'exploitation des ressources minières polaires, la banalisation de la géo-ingénierie au nom de la lutte contre le réchauffement climatique (expériences de modification du climat à très grande échelle, transformation de la chimie des océans, création de fleuves, assèchement de mers, etc.), les expérimentations sur la ionosphère dans la recherche de la maîtrise du plasma, la grille de destruction nucléaire planétaire, etc.